L’intelligence est partout sur cette planète
Nous sommes indécrottables car nous nous croyons supérieurement intelligents, et quelque part nécessaires au fonctionnement de notre Univers !
Ma réflexion vient d’un échange que j’ai eu sur Fb, à propos des incendies de végétations et forêts qui sévissent en ce moment sur la France. D’ordinaire, ces incendies sont plus spécialement localisés dans le sud, et le vol des canadairs, la sirène des pompiers, c’est notre quotidien.
L’an dernier, un incendie s’est donc déclaré à 150 mètres de chez moi, à l’occasion de la moisson. Une lame de métal a ripé sur une pierre, provoquant une étincelle et tout le chaume bien sec s’est enflammé. Le feu a rapidement gagné la broussaille, a traversé le chemin et s’en est pris à un autre champ. Trois champs ont été brulés. Tout était noir, calciné. L’incendie a pu être maitrisé par les pompiers alors qu’il menaçait des habitations d’un côté, et la garrigue de l’autre. J’ai longuement observé la nature dans les jours et semaines qui ont suivi. Au lendemain de l’incendie, l’odeur acre du brulé mouillé planait sur le village. Se balader était triste. La nature était en souffrance. On avait l’impression que tout était mort. Les arbres sans feuilles érigeaient leurs branches noires vers un ciel bleu sans nuages. Les amandes “grillées” pendaient, ce qui parait risible, mais ça donne une idée de l’incroyable résistance de la végétation. D’ailleurs moins d’une semaine plus tard, alors que nous étions en plein mois de juillet, l’herbe commençait à repousser. J’ai cru les arbres morts mais au printemps de cette année, tous étaient parés de leur plus beau feuillage. Poiriers, pommiers, amandiers sauvages, nous ont régalés par de leur floraison intense. Le bois des arbres est toujours noir mais la nature resplendit à nouveau. Du feuillage vert sur du bois noir, pourquoi pas ? Au loin, les grands arbres qui longent la garrigue ont deux couleurs. La partie qui a eu chaud est toujours aux couleurs d’automne et le sommet est vert.

Cet incendie n’était pas intentionnel et pas naturel non plus. Mais la nature s’en est accommodée, sans qu’on ait “besoin” d’intervenir. D’où ma question lors de notre échange : Qu’est-ce qui nous fait peur ?” Les incendies ont toujours existé. Ils sont nécessaires. La nature est intelligente. La Création est intelligente. Le feu existe, ce n’est pas un ennemi. D’ailleurs pendant longtemps on a pratiqué la culture sur brulis. Le feu assainit, le feu nettoie, le feu nourrit, le feu soigne. Le feu réchauffe, le feu protège. L’ennemi n’est pas le feu.
La personne a donc développé sa pensée. Ce qui lui fait peur ? D’abord mourir asphyxié, ce qui est étrange, mais après deux ans de bourrage de crâne coco, on peut le comprendre. Puis elle a “songé” à tous les animaux qui périssent lors des incendies. C’est la partie émotion, histoire de brouiller les pistes. Effectivement chez moi les milans noirs que j’aimais voir tourner au-dessus du champ voisin et du nôtre, ne sont plus là. On les voyait tourner lors de l’incendie. Essayaient-ils de sauver leur progéniture, ou alors en profitaient-ils pour chasser le petit gibier qui s’enfuyaient ? Bref.

La personne a ensuite évoqué la “désertification” des campagnes et donc la prolifération de la végétation. J’ai souri, gentiment. Ce billet n’est pas une critique mais juste un constat à travers un commentaire très révélateur. La personne estime donc que la présence humaine est indispensable et que la nature est complètement perdue et anarchique sans le grand savoir humain. C’est juste ahurissant et chacun de nous doit en tirer les conséquences. Nous croyons-nous vraiment indispensables ?
Puis elle m’a parlé des arbres “qu’on ne reverra pas pendant une ou deux générations”. Là, nous faisons du temps humain une mesure étalon, c’est plutôt mignon. Ne plus voir les arbres pendant une ou deux générations, comme c’est embêtant… Les arbres ne meurent déjà pas facilement. L’an dernier on a dû faire abattre cinq frênes qui avaient attrapé la maladie du frêne. Ils n’avaient aucune feuille, leur bois paraissait mort, craquelé. On craignait qu’ils tombent. Ce qui a bien faire rire l’élagueur. Dans trente ans, peut-être, nous a-t-il dit, et encore… Cette année, nous avons une véritable flopée de jeunes pousses, qui forment une épaisse haie buissonnante. Donc si vraiment l’incendie est suffisamment puissant pour parvenir à attaquer le bois de l’arbre, celui-ci n’est pas mort pour autant. Rappelons que le bois ne brule pas facilement. Petit rappel de la cathédrale Notre-Dame. On ne sait toujours pas comment des poutres d’une telle épaisseur ont pu ainsi flamber comme un fétu de paille !
Puis notre amie ajoute que si on replante, il faudra attendre tout ce temps (une ou deux générations) pour avoir à nouveau autant de végétation. “Avoir”. Avoir, posséder, nous y voilà. On ne le fait même pas exprès. Bien évidemment, on n’a pas non plus envie d’attendre. Il nous faut tout tout de suite. Sans s’en rendre compte, elle nous dit que la nature est une chose et que cette chose est là pour notre plaisir, à notre disposition. Ce n’est pas conscient, c’est en nous. Nous sommes formatés pour posséder, avoir l’illusion de posséder et pour nous battre pour garder nos illusions de possession, damned !
Puis elle poursuit en proposant : “replanter, oui, mais diversifier les espèces” et ajoute : “ça demande à faire des coupes parfois.” C’est un régal. Ce sentiment de supériorité que nous avons sur la nature. Replanter, diversifier, programmer, dessiner, etc… Cette chose qu’est la nature doit fonctionner selon nos règles et pour nous servir. Il serait inconvenant de laisser la nature livrée à elle-même, pensez voir ! Elle ferait n’importe quoi ! Durant des milliards d’années, elle a fait n’importe quoi, puis l’homme est arrivé, sauveur de l’Univers !!! Marvel, quand tu nous tiens…
Cela me fait penser à un témoignage d’un aborigène australien, chargé de s’occuper des forêts. Pour une fois, on s’est adressé à la bonne personne, quelqu’un qui dispose d’un savoir ancestral puisé non pas dans les livres ou dans le cerveau des savants, mais dans le vécu, l’expérience, l’observation. Il expliquait donc que les incendies s’étendaient parce que l’humain s’était mêlé de l’organisation de la nature. Naturellement, une végétation protectrice pousse en lisière des forêts, des “espèces” particulières peu sensibles au feu. Ça ne devait pas faire l’affaire de l’humain qui sait toujours tout et pète plus haut que son cul !
Enfin elle termine par la séquence émotion : dans les incendies, il y a bien des gens qui perdent tout ce qu’ils ont “accumulé” dans leur vie, les souvenirs, les photos, objets de famille, les biens, etc, tout ça part… J’ajoute “en fumée”… Voilà tout le problème de l’être humain !!! Voyager encombré, trainer son passé, ce boulet, dans la tête et dans les placards. Vivre dans le passé et redouter l’avenir. On ne sait pas vivre, on existe. On existe à travers ce qu’on possède, des biens matériels, mais aussi des biens affectifs. Aimerons-nous moins nos enfants sans l’album photo de leur première année de vie qui a cramé dans l’incendie ? Nous n’avons vraiment rien compris à la vie. La vie, c’est n’est ni la possession matérielle, ni la possession affective. La vie n’est pas Avoir, mais être. C’est simple à dire mais beaucoup plus compliqué à faire. Nous sommes tant et tant attachés à nos biens matériels, à nos biens affectifs, comment être quelqu’un si on nous en dépossède ? Comment se situer dans cette société de consommation si nous n’avons rien ? Notre valeur, c’est notre avoir, et nous en sommes fiers. Toute la société actuelle est basée sur la possession.
Et la nature est aussi notre possession. Notre chose. Les biens matériels, c’est quoi ? C’est rien, c’est de la poussière. Le feu les mange et les transforme en carbone, quand il ne s’agit pas de produits chimiques. Le carbone nourrit la terre, qui nourrit le vivant, et nous retournerons à la terre, nous redeviendrons poussière, et ainsi le cycle s’accomplit. N’est-ce pas prétentieux de croire que nous allons laisser une trace de notre passage, de ce passé si insignifiant qu’il disparait en fumée au moindre craquement d’allumette ? Des milliards d’humains sont nés, sont morts, et n’ont laissé aucune trace. Ils sont retournés à la terre, ils font partie de l’univers. N’est-ce pas suffisant ? Je me pose la question : quand commencerons-nous à avoir un peu d’estime pour nous ? Quand commencerons-nous à nous aimer ? A nous accomplir, à être ?
Quand aux animaux qui meurent dans les incendies, c’est triste, bien sûr, mais c’est la vie. Les incendies, les catastrophes naturelles, les irruptions volcaniques, les tsunamis, les aléas météorologiques, c’est ainsi que vit et évolue la planète, nous n’y pouvons rien. La nature a parfois besoin de faire du nettoyage. Comme nous faisons du nettoyage grâce aux virus. La mort fait partie de la vie, les animaux le savent, c’est pourquoi ils ne s’apitoient pas sur leur sort. Ils ne s’estiment ni supérieurs, ni indispensables. Les animaux vivent la vie, c’est tout. Ce que nous ne savons pas faire, parce que nous sommes apeurés en permanence.
Par contre, les incendies volontaires, par intérêt, vengeance, plaisir, font des victimes, ce qui n’est pas prévu au programme. Mais qu’est-ce qui brule en priorité ? Des forêts artificielles, telle celle des Landes, forêt de pins plantés pour retenir la dune. Pourquoi la dune devrait-elle rester figée ? Pour protéger des habitations. Lors de l’incendie à l’orée de mon village, les maisons menacées étaient celles qui avaient été construites sur la garrigue. La garrigue est un fouillis organisé de la nature, absolument merveilleuse. Seulement elle est constamment menacés par l’humain. Elle est bordée de champs de culture qui forcément créent un danger. Il semble que l’incendie en Gironde soit un tantinet volontaire. Le bruit court que l’installation d’un parc de panneaux solaires est prévu en lieu et place de feu la forêt de pins.
Les incendies sont volontaires, sur des forêts devenues artificielles. Ça fait la une des journaux, les gens s’indignent. Notre mode de pensée est totalement erroné mais truffé de bonnes intentions. De bonnes intentions basées sur une raisonnement faux. Lorsque nous cesserons d’exister, de baser cette existence sur l’avoir, nous aurons enfin une ouverture vers l’être. Si quelqu’un croit que ça va prendre “une ou deux générations”, comme la repousse des arbres, qu’il s’impatiente, trouvant le temps long, trop long, qu’il se rassure. Le temps est relatif. Notre temps n’est pas celui de l’espace ni celui de la planète. Un tout petit pas vers la dépossession matérielle et affective sera déjà un grand pas vers l’humanité. Car franchement, réfléchissez, croyez-vous que nous avons été nantis d’une conscience pour accumuler des biens matériels, des émotions, un comportement compulsif ? Pour nous recroqueviller sur nos peurs, nos certitudes, notre orgueil ? La possession crée le manque, la frustration, la colère, les certitudes. Quand on dit lâcher prise, c’est pas rien…
Bonne journée, et merci de m’avoir lue…
